Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/480

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quel terrible sort était réservé à la Flandre condamnée.

— Oui, oui, répondit le comte d’Artois à une question du sire de Châtillon, il faut tout exterminer. Ces damnés Flamands ne peuvent être domptés que par le fer et le feu ; et, si nous laissions en vie ce tas de rebelles, nous n’en viendrions jamais à bout ; or, il faut que cela finisse. Messires, menons rondement l’affaire, pour que notre épée ne soit pas souillée trop longtemps de ce sang impur.

— Vraiment, dit Jean de Raneel, le léliard, vraiment, monseigneur d’Artois, vous avez raison, car il est impossible de rien faire de ces mutins ; ils sont trop riches et se croiraient bientôt au-dessus de nous. Déjà ils se refusent à reconnaître le droit que nous, issus d’un sang noble, avons de les traiter comme nos sujets, comme si l’argent qu’ils ont gagné par le commerce pouvait anoblir leur sang. Ils se sont construits à Bruges et à Gand des maisons qui surpassent nos châteaux en luxe et en magnificence : n’est-ce pas là une sanglante injure pour nous ? Nous ne pouvons supporter cela plus longtemps.

— Et que ferez-vous quand vous aurez mis à mort tous vos vassaux ? demanda le gigantesque Hugues d’Arckel en riant. Sur ma foi, vous en serez réduits à labourer vos terres vous-mêmes ; belle perspective, en vérité !

— Oh ! répondit Jean de Raneel, je sais un excellent moyen d’y pourvoir : quand la Flandre sera purgée de cette engeance entêtée, je ferai venir des