Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/519

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Ils se jetaient, poitrine nue, au milieu des armes de toute sorte et recevaient la mort ou le coup qui venait les frapper sans reculer le moins du monde. Ceux-là seuls osaient vraiment regarder la mort en face et la narguer ; aussi tout tombait-il sous leurs coups dès qu’ils apparaissaient. Leurs haches coupaient les jambes des chevaux et fendaient la tête des chevaliers tombés avec leur monture. Un instant après qu’ils étaient venus au secours de Guillaume de Juliers, ils avaient si bien fait place nette, qu’il ne restait plus qu’une vingtaine de Français au delà de la ligne de bataille des Flamands. Parmi eux se trouvait Godefroi de Brabant qui combattait dans les rangs des ennemis de sa patrie.

En l’apercevant, messire de Renesse lui cria :

— Godefroi ! Godefroi ! tu vas mourir !

— Tu veux parler de toi ! répondit Godefroi en assénant un coup violent sur la tête de messire Jean ; mais celui-ci, faisant tournoyer rapidement son épée, en frappa Godefroi sous le menton, avec une telle force, qu’il le jeta hors de selle. Alors vingt bouchers tombèrent sur lui, et il reçut vingt blessures dont la moindre eût suffi à lui donner la mort. Sur ces entrefaites, Jean Breydel, avec quelques-uns de ses hommes, ayant pénétré plus avant dans les rangs de l’ennemi, avait tant et si bien combattu qu’il avait conquis l’étendard de Brabant ; il regagna, avec ce trophée, le gros des siens, déchira en pièces la bannière et en jeta la hampe au loin en s’écriant :