Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/550

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où disparaissaient les pieds des combattants. Morts, mourants et blessés gisaient pêle-mêle au milieu des casques brisés, des tronçons d’épée, des cuirasses entamées.

Quelques léliards, parmi lesquels se trouvaient Jean de Gistel et un certain nombre de Brabançons, voyant qu’il n’y avait plus de salut possible, accoururent au milieu des Flamands en criant :

— Flandre au Lion ! Vive la Flandre !

Ils croyaient se sauver par cette manœuvre, mais un tisserand s’élança sur-le-champ vers Jean de Gistel et lui assena sur la tête un coup si terrible qu’il lui brisa le crâne ; le tisserand murmura d’une voix sourde :

— Mon père te l’a dit, traître, que tu ne mourrais pas dans ton lit.

Les autres furent trahis par leurs armures, et mis à mort comme gens qui avaient renié leur pays.

Guy eut compassion des chevaliers qui restaient encore debout et se défendaient si courageusement ; il leur cria qu’ils eussent à se rendre à lui, déclarant qu’ils auraient la vie sauve. Convaincus que le plus intrépide courage ne leur pouvait servir désormais, ils se rendirent et furent désarmés ; Jean Borlunt fut chargé de leur garde.

Le principal de ces nobles prisonniers de guerre, dont le nombre s’élevait à près de soixante, était Thibaut II, jadis duc de Lorraine ; les autres étaient tous de noble souche et renommés comme braves guerriers.