Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/64

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vers ses vassaux, il leur dit d’une voix exaltée :

— Voyez, messires ! voilà comme les comtes de Flandre revivent dans leur race ; je reconnais ma jeunesse, — voilà comme ont toujours été les Dampierre. Jugez par ce que vous venez de voir et d’entendre si Robert n’est pas digne de la couronne de comte ! Ô ma Flandre bien-aimée, sois fière de tes enfants ! Oui, Robert, oui tu as raison. Il ne faut pas qu’un comte de Flandre courbe la tête devant l’étranger. Mais je suis vieux, je suis le père de Philippine captive, je suis ton père, mon vaillant fils ; moi seul ploierai le genou devant l’orgueilleux Philippe ; — ainsi l’ordonne Dieu ! Je me soumets à sa volonté sainte. Tu m’accompagneras, mais ne courbe pas le front, reste debout, mon fils, afin que le comte qui viendra après moi soit franc de tout blâme et de toute humiliation.

Il fut ensuite question des préparatifs du voyage, et l’on discuta mainte question politique, Robert de Béthune, redevenu calme et de sang-froid, quitta la salle et se rendit dans la pièce où se trouvait Mathilde. Il prit sa fille par la main et la conduisit à un fauteuil : puis il attira un autre siége et s’assit à côté d’elle.

— Ma chère Mathilde, dit-il, tu aimes ton père, n’est-ce pas ?

— Oh ! vous le savez bien ! s’écria la jeune fille en caressant de sa douce main les joues rudes et hâlées du chevalier.