Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/87

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Didier. Dans la crainte de surprise et de trahison, — car je ne me fiais pas à leurs paroles équivoques, — j’ai sans cesse veillé, épié, écouté !… J’ai vu Jeanne de Navarre, — j’ai entendu sa voix. J’engage mon honneur comme garantie de la véracité de mes paroles.

— Écoutez, messires, dit Gauthier de Lovendeghem, ne nous abusons pas. Jeanne de Navarre est réellement, auprès du roi, puisque notre loyal compagnon l’affirme sur son honneur. L’impitoyable reine, n’en doutons pas, va mettre tout en œuvre pour faire échouer notre démarche et anéantir notre espoir de salut ; et Dieu sait que les moyens ne lui manqueront pas. Un seul parti nous reste à prendre pour échapper à ce piége infâme ; c’est de fuir à l’instant même. Dans un instant peut-être, on viendra nous arrêter, et il sera trop tard.

Le vieux comte, triste et morne, se livrait au désespoir en présence d’une aussi périlleuse situation ; il se trouvait au cœur même du domaine royal, et il lui semblait impossible de s’enfuir pour regagner la Flandre. Robert de Béthune exhalait sa colère en paroles entrecoupées et en maudissant intérieurement le voyage qui l’avait jeté, ainsi désarmé, entre les mains de ses ennemis.

Pendant que, plongés dans un morne silence, tous contemplaient le comte profondément abattu, un page de la cour ouvrit la porte de la salle et annonça :