Page:Conscience - Le Lion de Flandre, 1871.djvu/95

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sire, cet honneur que j’ai gardé pur et intact de toute souillure, va donc être flétri ! et cela, aux yeux de la France et de l’Europe, et cette tache, cet affront, ce serait par vous qu’ils m’arriveraient, par vous, mon roi, par vous, mon frère ! Vous feriez de moi un traître, et le front de votre frère se baisserait sous le nom insultant de chevalier félon ! Oh ! sire, cela ne peut pas être ! songez que j’ai donné un sauf-conduit à Guy, comte de Flandre, et que vous faites de moi un parjure.

En prononçant ces paroles, Charles de Valois s’était peu à peu laissé emporter par la colère. Son regard avait une telle puissance, que Philippe fut sur le point de révoquer sa sentence. Lui-même, il estimait l’honneur le bien le plus précieux d’un chevalier, et il sentait au fond du cœur tout ce que sa conduite avait de contraire à ce sentiment. Cependant les Flamands s’étaient relevés et attendaient avec anxiété le résultat de l’intervention du comte de Valois. Les autres spectateurs ne témoignaient leur émotion par aucun mouvement, et leurs regards se portaient alternativement sur le roi, son frère, Jeanne de Navarre et les seigneurs flamands.

La reine Jeanne prit à l’instant la parole, et, dans la crainte que sa proie ne lui échappât, elle s’écria avec une passion jalouse :

— Monseigneur de Valois, à vous moins qu’à tout autre il n’est permis de défendre les ennemis de la France. Vous vous rendez coupable de félonie, et ce