Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/122

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La jeune fille cacha les larmes qui germaient dans ses yeux, et se détourna de lui, prête à s’éloigner.

— Cruelle ! s’écria le jeune homme d’une voix déchirante, vous me quittez pour toujours sans adieu, sans un mot de consolation ? Vous demeurez sourde à ma prière, insensible à ma douleur ? C’est bien, je subirai mon sort : vous l’avez voulu !

Il se releva brusquement, puis sa tête se pencha sur la table, tandis qu’il continuait en versant des larmes amères :

— Lénora, mon amie, vous me condamnez à mourir ! Je vous pardonne : soyez heureuse sur la terre sans moi ! Adieu, adieu pour toujours !

En disant ces mots, ses forces l’abandonnèrent ; il tomba sur le siège que venait de quitter Lénora, et ses bras défaillants s’affaissèrent sur la table.

Lénora avait fait deux ou trois pas pour s’éloigner ; mais les tristes plaintes de Gustave l’avaient retenue. On pouvait lire sur son visage un violent combat entre le devoir et l’amour. Enfin, son cœur parut faiblir dans la lutte, et des larmes abondantes jaillirent de ses yeux. Elle s’approcha lentement du jeune homme, prit une de ses mains, et murmura d’une voix attendrie et pleine de sanglots :

— Gustave, mon pauvre ami, nous sommes bien malheureux, n’est-ce pas ?

Au contact de cette main chérie, au doux son de cette voix aimée, le jeune homme revint à lui. Son regard s’arrêta sur les yeux de la jeune fille avec un ineffable sourire, et à demi égaré par la joie, il lui dit :