Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/126

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joie, et j’y puiserai le courage de supporter l’absence…

Lénora pleurait silencieusement ; la douce et émouvante parole du jeune homme avait tout à fait vaincu son orgueil ; son cœur n’avait plus de place que pour l’amour et la tristesse. Gustave s’en aperçut.

— Je pars Lénora, dit-il, fort de votre affection ! C’est avec un ferme espoir que je quitte mon pays et ma bien-aimée. Quoi qu’il arrive maintenant, je ne me laisserai abattre ni par le chagrin, ni par le découragement. Lénora, vous penserez à moi, tous les jours, n’est-ce pas ?

— Mon Dieu, j’ai promis à mon père de vous oublier ! murmura la jeune fille avec une sorte d’effroi.

— M’oublier ? Vous vous efforcerez de m’oublier ?

— Non, Gustave, dit-elle d’une voix douce ; je désobéirai pour la première fois à mon père ; je sens mon impuissance à tenir une vaine promesse, je ne puis vous oublier ; je vous aimerai jusqu’à ma dernière heure : c’est ma destinée sur la terre !

— Oh ! merci, merci, Lénora, s’écria Gustave avec exaltation. Tes douces paroles me font puissant contre le sort. Reste ici, ma bien-aimée, sous la garde de Dieu ; ton image me suivra comme un ange protecteur ; dans mes joies et dans mes douleurs, le jour et la nuit, toujours… toujours tu seras sous mes yeux, Lénora ! La séparation brise mon cœur, mais le devoir commandé, je sens qu’il faut obéir. Adieu, adieu !

Il saisit convulsivement les mains de la jeune fille, les serra d’une étreinte fébrile, et disparut sous les massifs de verdure :