Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/393

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— Taisez-vous, laissez-moi tranquille, ou j’en deviendrai fou ! Heureux, heureux, eh ! Je ne changerais pas ma condition contre celle d’un roi ! Approchez-vous du feu, brave femme, et chauffez-vous bien… Allons, Jeannette, apporte un peu de ramilles et souffle, souffle, que cela pétille bien !…

Depuis quelques instants déjà Cécile était assise près du foyer, tenant la petite fille sur ses genoux. Ce qu’elle disait tout bas à l’enfant joyeuse, les autres ne l’entendaient pas ; mais elle dut lui dire des paroles d’une angélique douceur, car la petite enlaça ses bras au cou de sa protectrice et l’embrassa.

La pauvre veuve contemplait ce spectacle avec un sourire céleste.

Bientôt Cécile posa l’enfant à terre ; elle s’approcha de la mère et lui parla à voix basse. Ostensiblement elle pria la veuve de quitter la ferme avec elle.

Jeannette, qui le remarqua comme les autres, vint se placer à côté de son frère et lui dit à l’oreille :

— Que va faire Cécile avec la veuve ? Elle ne la mènera pas à son oncle, sûrement ?

— Ne le vois-tu pas ? Elle va lui donner de l’argent…

— Ah ! oui, les quatorze sous qu’elle a reçus tout à l’heure de l’hôtesse du Cerf pour la couture de ces hardes d’enfant. Cette Cécile donne en vérité tout ce qu’elle peut gagner ! Il faut que son oncle le sache !

— Garde-toi de te mêler de cela, Jeannette ! À coup sûr ce ne sont pas nos affaires !

— Non, Barthélemy, c’est seulement pour dire, vois-tu ?