Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/41

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sur ses traits et que sa tête s’affaissait lentement sur sa poitrine.

Un instant d’attention suffisait pour qu’on se sentît attiré vers cet homme par une secrète sympathie. Son visage, bien qu’amaigri et creusé de rides nombreuses, était si régulier et si noble, son regard à la fois si doux et si profond, son large front si pur et si imposant, qu’on ne pouvait douter qu’il ne fût doté de tous les trésors de l’esprit et du cœur.

Selon toute apparence cet homme avait beaucoup souffert. Si l’expression de sa physionomie n’en eût pas donné la complète conviction il suffisait pour l’attester des cheveux blancs qui, de si bonne heure, attachaient à son crâne une couronne argentée, et du feu sombre et étrange qui brillait parfois dans ses yeux noirs, comme un reflet des pensées qui l’accablaient.

Le costume concordait parfaitement avec l’extérieur de celui qui le portait ; il était marqué du cachet de cette riche et l’on pourrait dire magnifique simplicité que peuvent seuls donner une grande habitude du monde et un sentiment exquis des convenances. Son linge était d’une remarquable blancheur, le drap de son habit d’une extrême finesse, son chapeau d’une fraîcheur parfaite.

De temps en temps, lorsque quelqu’un passait sur la chaussée, il tirait une belle tabatière d’or et y prenait une prise d’une façon si distinguée que rien qu’à ce geste significatif on eût pu dire qu’il appartenait aux classes les plus élevées de la société.

Il est vrai qu’un œil inquisiteur et malveillant eût pu,