Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/522

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et sans nul doute ils en eussent fait une justice sommaire et terrible, si les gendarmes, comprenant le danger, n’eussent tiré leurs sabres pour défendre au besoin le prisonnier.

Les paysans irrités renoncèrent à leurs projets de violence, mais ils accompagnèrent les gendarmes jusqu’au village en accablant l’assassin de menaces et d’imprécations, jusqu’à ce que celui-ci disparut à leurs yeux avec ses gardes sur la chaussée qui conduit à la ville.

Dix années se sont écoulées depuis lors. Le vieux couvent s’est transformé en une vaste ferme dont les étables renferment trois chevaux et douze vaches ; servantes et valets s’empressent à l’envi ; le bruit du travail y retentit joyeusement du matin jusqu’au soir. Les fenêtres sont peintes en vert ; les murs sont réparés et blanchis ; tout y atteste l’aisance et le bonheur.

Lorsque le soleil brille on voit, assis sur le banc à côté de la porte, un vieillard caduc dont les mains engourdies par l’âge tremblent sans cesse. Auprès de lui une vieille femme est occupée à tricoter ; le vieillard joue avec deux petits enfants, un garçon et une fille, auxquels il parle d’économie en leur assurant que c’est la source de toute richesse. Ce sont les enfants de sa nièce Cécile ; Barthélemy est leur père, et ils nomment la vieille femme grand’mère Anne.

Le vieil oncle a prêté à Barthélemy beaucoup d’argent… à intérêt, à un petit intérêt. Ces revenus, qui lui sont régulièrement payés, il les épargne pour le petit garçon assis sur ses genoux. Il aime tant ce petit mar-