Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/527

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venirs qui se pressaient dans mon âme comme un flot brûlant et embaumé.

Combien notre âme doit avoir d’amour et de puissance, dans les jours de la jeunesse, pour enfermer à jamais en soi tout ce qui l’entoure, et l’envelopper d’affection comme d’un impérissable voile ! Hommes, arbres, maisons, paroles, tout, — vivant ou inanimé, — tout devient une partie de notre être ; à chaque objet nous attachons un souvenir aussi beau, aussi doux, que notre jeunesse elle-même. Notre âme déborde de force, elle lance des étincelles et des reflets de sa vie sur toute la création ; et tandis que nous saluons d’un hymne joyeux et incessant le bonheur qui nous sourit à tous, enfants ou jeunes gens, dans un avenir sans bornes, tout dans la nature chante et se réjouit à l’unisson avec nous.

Ah ! combien j’aime la bruyère, le tilleul, la ferme, la chapelle et tout ce qui me parlait au temps où les roses de la jeunesse et les lis de la chaste poésie des premières années couronnaient mon front ! Ils ont partagé toutes mes jouissances ; je les ai vus s’épanouir voluptueusement et resplendir sous la chaude lumière du soleil, alors que, dans ma joyeuse insouciance, je m’élançais dans le chemin inconnu des destinées humaines. Ce sont mes vieux compagnons de jeu, mes amis. Chacun d’eux me rappelle un souvenir agréable, une douce émotion ; ils parlent la langue de mon cœur ; toutes les fibres les plus délicates de mon âme tressaillent à leur appel avec une juvénile énergie, et, dans un calme et religieux attendrissement, je remercie le Seigneur de ce