Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/610

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de prononcer un seul mot, deux mains puissantes s’appesantirent sur les épaules du baron, et d’un seul coup le jetèrent sur le sable à trois ou quatre pas de là.

Le baron se releva furieux, arracha le tuteur d’un dahlia et se précipita Vers Karel, qui l’attendait avec un rire où se mêlaient l’égarement et la soif de la vengeance. Le baron porta au jeune homme un tel coup à la tête, que le sang coula le long de ses joues ; ce fût le signal d’une lutte furieuse. Karel saisit son ennemi au milieu des reins, le souleva en l’air, et le jeta comme une pierre sur le sol. Néanmoins le baron se releva, et lutta contre le vigoureux jeune homme jusqu’à ce que celui-ci l’étendit dans le chemin et, le genou sur sa poitrine, lui meurtrit et lui ensanglantât le visage à coups de poing.

Lisa, gémissante et poussant des cris d’alarme, était restée jusqu’au moment où la première goutte dé sang avait frappé son regard ; alors elle avait pris la fuite, et un peu plus loin s’était affaissée sans connaissance sur le gazon.

Cependant ses cris avaient été entendus des autres promeneurs et même des domestiques, et les avaient remplis d’épouvante. Ils accoururent de différents côtés, et arrachèrent le jeune homme du corps du baron.

Adolphe ordonna aux domestiques de bien tenir le brasseur ; ceux-ci l’avaient empoigné à cinq ou six au moins, et lui contenaient les bras, tandis que lui, égaré, contemplait l’adversaire qu’il venait de mettre en si piteux état.

Baes Gansendonck avait couru à sa fille et s’arrachait