Page:Conscience - Scenes de la vie flamande.djvu/78

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sur le visage de la servante lorsque s’échappèrent de la bouche de Lénora rêveuse quelques notes d’une chanson populaire bien connue.

La servante quitta sa chaise, s’approcha timidement de sa maîtresse, et lui dit, d’un ton de prière, à l’oreille, mais assez haut pour être comprise de Lénora :

— Oh ! fermière, priez un peu la demoiselle de chanter un ou deux couplets de cette chanson. Je l’ai entendue avant-hier ; et c’était si beau, si beau, que je suis restée un quart d’heure à pleurer derrière les noisetiers comme une imbécile que je suis.

— Oh oui ! dit la fermière d’une voix suppliante, si cela ne vous fatigue pas trop, mademoiselle, cela nous fera tant de plaisir ! Vous avez une voix comme un rossignol, et je sais aussi, mademoiselle, que ma mère, — elle est depuis longtemps auprès du bon Dieu, — m’endormait toujours avec cette chanson. Ah ! chantez-nous-la !

— Elle est si longue ! dit Lénora en souriant.

— Quand ce ne serait que quelques couplets ! C’est aujourd’hui un jour de joie !

— Eh bien, dit Lénora, puisque cela peut vous faire plaisir, pourquoi refuserais-je ? Écoutez donc !

« Au bord d’un rapide torrent était assise une jeune fille désolée ; elle pleurait et gémissait sur l’herbe baignée de ses larmes ;

« Elle jetait dans le torrent les petites fleurs qui s’épanouissaient autour d’elle ; elle s’écriait : Ah ! mon père chéri ! ah ! mon frère bien-aimé, revenez !