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nouvelle institution criminelle nous enlève au jugement de nos pairs, pour placer nos fortunes, notre vie et notre honneur, sous la main des magistrats, que le roi rassure sa propre conscience, qu’il délègue aux juges ses mandataires, en mettant la leur à l’abri par l’inamovibilité de leurs fonctions ! »

Le roi, Messieurs, est fait pour comprendre ce langage.

Ainsi que la question d’inamovibilité, celle de la représentation directe n’en est depuis long-temps plus une pour vous et pour la France. Ouvrez le mémorable rapport de l’illustre président de la commission des affaires coloniales, c’est par un projet de représentation des colonies au sein des chambres qu’il débute. Quant à vous, Messieurs, quatre de vos sessions ont successivement débattu l’opportunité de cette demande. Ce sentiment intime de l’individualité qui se cantonne vous écartait avec effroi de ce tout qui allait vous emporter dans une spirale immense : une fois mêlés ensemble, des éléments, quels qu’ils soient, s’aggrègent, s’assimilent, se confondent ; or, vous teniez à votre spécialité et à votre forme. Mais vint le moment où vous pûtes reconnaître que votre intérêt particulier n’était plus de force à protéger cette individualité, cette spécialité, cette forme, et vous avez compris qu’il vous fallait être ce que sont les autres pour n’être pas moins que les autres. Vous avez alors demandé la représentation directe des colonies au sein des chambres.

Vous aviez été prévenus par les colons, vos frères, résidant à Paris. Placés au centre de l’opinion, près du pouvoir ; effrayés de ce qu’ils entendaient dire des effets de la loi de juillet dans les colonies, plus effrayés encore des effets ultérieurs que s’en promettait le gouvernement, qui pesait sur son ressort ; menacés de l’abolition partielle des enfants et encore de celle des esclaves de traite de 1817, ils présentèrent aux chambres une pétition qui concluait à la représentation directe des colonies au sein des chambres. Il y fut répondu par un mot, et ce mot était peut-être sans réplique en l’état : c’est qu’un pays régi exceptionnellement ne pouvait pas prétendre à la représentation commune. Ce mot, il faut nous en emparer, Messieurs, car, s’il était un déni pour eux, il est une