Page:Constant - Œuvres politiques, 1874.djvu/412

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D’une race militaire n’agissant que par intérêt.

Les peuples guerriers, que nous avons connus jusqu’ici, étaient tous animés par des motifs plus nobles que les profits réels et positifs de la guerre. La religion se mêlait à l’impulsion belliqueuse des uns ; l’orageuse liberté dont jouissaient les autres leur donnait une activité surabondante qu’ils avaient besoin d’exercer au dehors. Ils associaient à l’idée de la victoire celle d’une renommée prolongée bien au-delà de leur existence sur la terre, et combattaient ainsi, non pour l’assouvissement d’une soif ignoble de jouissances présentes et matérielles, mais par un espoir en quelque sorte idéal, et qui exaltait l’imagination, comme tout ce qui se perd dans l’avenir et le vague.

Il est si vrai que, même chez les nations qui nous semblent le plus exclusivement occupées de pillage et de rapines, l’acquisition des richesses n’était pas le but principal, que nous voyons les héros scandinaves faire brûler sur leurs bûchers tous les trésors conquis durant leur vie, pour forcer les générations qui les remplaçaient à conquérir, par de nouveaux exploits, de nouveaux trésors. La richesse leur était donc précieuse comme témoignage éclatant des victoires remportées, plutôt que comme signe représentatif et moyen de jouissances.

Mais si une race purement militaire se formait ac-