Page:Constant - Adolphe.djvu/190

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Son agitation devint extrême. Elle posa son front sur ma main ; il était brûlant ; une contraction terrible défigurait ses traits. — Au nom du ciel, m’écriai-je, chère Ellénore, écoutez-moi. Oui, je suis coupable : cette lettre… Elle frémit et voulut s’éloigner. Je la retins. Faible, tourmenté, continuai-je, j’ai pu céder un moment à une instance cruelle ; mais n’avez-vous pas vous-même mille preuves que je ne puis vouloir ce qui nous sépare ? J’ai été mécontent, malheureux, injuste ; peut-être, en luttant avec trop de violence contre une imagination rebelle, avez-vous donné de la force à des velléités passagères que je méprise aujourd’hui ; mais pouvez-vous douter de mon affection profonde ? nos âmes ne sont-elles pas enchaînées l’une à l’autre par mille liens que rien ne peut rompre ? tout le passé ne nous est-il pas commun ? pouvons-nous jeter un regard sur les trois années qui viennent de finir, sans nous retracer des impressions que nous avons