Page:Constant - Adolphe.djvu/261

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qu’il a façonnées pour son usage qui soient muettes, parce qu’elles sont mortes. Mais ces choses mêmes, lorsque le temps anéantit leur utilité, reprennent une vie mystique. La destruction les remet, en passant sur elles, en rapport avec la nature. Les édifices modernes se taisent, mais les ruines parlent. Tout l’univers s’adresse à l’homme dans un langage ineffable qui se fait entendre dans l’intérieur de son âme, dans une partie de son être inconnue à lui-même, et qui tient à la fois des sens et de la pensée. Quoi de plus simple que d’imaginer que cet effort de la nature pour pénétrer en nous n’est pas sans une mystérieuse signification ? Pourquoi cet ébranlement intime, qui paraît nous révéler ce que nous cache la vie commune, serait-il à la fois sans cause et sans but ? La raison, sans doute, ne peut l’expliquer. Lorsqu’elle l’analyse, il disparaît ; mais il est, par là même, essentiellement du domaine de la poésie. Consacré par elle, il trouve dans tous les cœurs des cordes qui lui