Page:Constant - La Druidesse.djvu/64

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N’as-tu pas un regard ? A quoi servit leur foi ?
Cette nuit, sans rival, le sombre Dis est roi :
Comme un vaste linceul enveloppant les ondes,
Son manteau couvre tout de ténèbres profondes !
O Gaule, noble terre ! ainsi, tes deux enfants
Héros et druidesse, au lieu de triomphants
Voguent inanimés, seuls, au gré de la brise,
Leur esquif redoutant qu’un rocher ne le brise.
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Sous le pli ténébreux, par le flux emportés,
Roulent de l’océan les flots ensanglantés :
La masse frémissante, ondes armoricaines,
Se mêle aux eaux du Mor jusqu’aux rives lointaines
Qu’elle fait résonner d’un lugubre sanglot.
De la presqu’île sainte au rocher de l’îlot,
Du Dolmen au Gwenet, partout la plaine humide
Se couvre en frissonnant d’une teinte livide.
Le Mor entier tressaille : un long gémissement,
De l’abîme échappé, remonte au firmament
O, d’une race fière, infortuné génie,
Sur ton aile prends-tu le soupir d’agonie
Qu’exhale dans la nuit le noble sein blessé,
De la Gaule pleurant ses fils et son passé ?
Hélas ! ces longs soupirs, cette plainte profonde,
Ce râle s’élevant des entrailles de l’onde.
Ce bruit d’ailes dans l’air, c’est l’appel déchirant :
Le Mor a cette nuit son funèbre courant,
Ainsi que le Plogoff son grand flot du passage.
Mais si c’est le concert du lugubre voyage,
Des esprits où sont donc les barques dans la nuit ?
Où, le pieux marin qui, morne, les conduit ?
Errantes sur les eaux, seules ombres muettes,
Les deux nacelles sœurs, ainsi que deux mouettes,