Page:Constant - Le Cahier rouge, éd. Constant de Rebecque.djvu/39

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ne pas compromettre la dame de mes pensées.

L’hiver étant venu, mon père me dit de me préparer à le suivre à Paris. Mon désespoir fut sans bornes. Madame Trevor y parut très sensible. Je la pris souvent dans mes bras, j’arrosai ses mains de mes larmes, j’allai passer des nuits à pleurer sur un banc où je l’avais vue assise ; elle pleurait avec moi ; et si j’avais voulu ne plus disputer sur les mots, j’aurais peut-être eu des succès plus complets. Mais tout se borna à un chaste baiser sur des lèvres tant soit peu fanées. Je partis enfin dans un état de douleur inexprimable. Madame Trevor me promit de m’écrire, et on m’emmena.

Ma souffrance était tellement visible qu’encore deux jours après, un de mes cousins, qui voyageait avec nous, voulut proposer à mon père de me renvoyer en Suisse [1], persuadé qu’il était que je ne soutiendrais pas le voyage. Enfin, je le soutins et nous arrivâmes [2]. Je trouvai une lettre de madame Trevor. La lettre était froide, mais je lui sus gré de m’avoir tenu sa promesse. Je

  1. Voir Appendices XI et XII, pp. 113 et 114.
  2. Voir Appendice XIII, p. 115.