Page:Constant - Le Cahier rouge, éd. Constant de Rebecque.djvu/38

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heures du matin. Mais elle n’y gagna rien ni moi non plus. J’étais d’une timidité excessive, et d’un emportement frénétique ; je ne savais pas encore qu’il fallait prendre au lieu de demander ; je demandais toujours et ne prenais jamais. Madame Trevor dut me trouver un amant d’une singulière espèce. Mais comme les femmes aiment toujours tout ce qui prouve qu’elles sont propres à inspirer une grande passion, elle s’accommoda de mes manières et ne m’en reçut pas plus mal.

Je devins jaloux d’un Anglais qui ne se souciait pas le moins du monde de madame Trevor. Je voulus le forcer à se battre avec moi. Il crut m’apaiser en me déclarant que loin d’aller sur mes brisées, il ne trouvait pas même madame Trevor agréable. Je voulus alors me battre avec lui parce qu’il ne rendait pas justice à la femme que j’aimais. Nos pistolets étaient déjà chargés lorsque mon Anglais, qui n’avait aucune envie d’un duel aussi ridicule, s’en tira fort adroitement. Il voulut des seconds et m’annonça qu’il leur dirait pourquoi je lui avais cherché querelle. J’eus beau lui représenter qu’il devait me garder un pareil secret, il se moqua de moi, et je dus renoncer à ma brillante entreprise pour