Page:Constant - Le Cahier rouge, éd. Constant de Rebecque.djvu/52

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

n’aimait pas, et je lui proposai de l’enlever. Sa mère, à qui sans doute elle montra cette étrange lettre, eut pour moi l’indulgence de laisser sa fille me répondre comme si elle ne l’en avait pas instruite.

Mademoiselle Pourras — elle s’appelait ainsi — m’écrivit que c’était à ses parents à décider de son sort, et qu’il ne lui convenait pas de recevoir des lettres — d’un homme. Je ne me le tins pas pour dit et je recommençai de plus belle mes propositions d’enlèvement, de délivrance, de protection contre le mariage qu’on voulait la forcer à contracter. On eût dit que j’écrivais à une victime qui avait imploré mon secours, et à une personne qui avait pour moi toute la passion que je croyais ressentir pour elle : et dans le fait, toutes mes épîtres chevaleresques étaient adressées à une petite personne très raisonnable qui ne m’aimait pas du tout, qui n’avait aucune répugnance pour l’homme qu’on lui avait proposé, et qui ne m’avait donné ni l’occasion ni le droit de lui écrire de la sorte. Mais j’avais enfilé cette route et pour le diable je n’en voulais pas sortir.

Ce qu’il y avait de plus inexplicable c’est que,