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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/170

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CONTES SECRETS RUSSES

broussa chemin ; après avoir fait trente pas, il s’arrêta et se retourna pour voir à quelle distance ils étaient. Pendant ce temps, le bourlak, voulant faire à sa soi-disant sœur des adieux dignes de lui, l’avait couchée sur le talus de la route et s’était mis en devoir de la βαισερ ; mais, pour mieux tromper le mari, il avait passé son bonnet au pied droit de la popadia et ordonné à celle-ci de lever la jambe en l’air. Durant le déduit, le pied coiffé du bonnet ne cessait de s’agiter ; ce que voyant, le pope se dit : « Quel parent affectueux ! Il est déjà bien loin, et il n’en continue pas moins à m’envoyer des saluts avec son bonnet. » Lui-même ôta sa chapka et commença à l’agiter en criant « Adieu, beau-frère, adieu ! » Après avoir reçu les adieux chaleureux du bourlak, la popadia, toute heureuse, rejoignit son époux ; dans sa joie, elle chantait des chansons. « Depuis tant d’années que je vis avec elle, » remarqua le pope, « c’est la première fois que je l’entends chanter. » — « Eh bien ! batouchka, » dit-elle, « je viens de faire la conduite à mon cher frère, me sera-t-il donné de le revoir encore une fois ? — Dieu est miséricordieux, tu auras peut-être encore ce bonheur. »