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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/169

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CONTES SECRETS RUSSES

paix ! Qu’elle repose avec les saints ! » Ainsi se passa toute la nuit[1].

Le lendemain matin, le bourlak se disposa à retourner chez lui, mais la popadia n’eut garde de le laisser partir à jeun, elle lui offrit du pâté, lui versa de l’eau-de-vie, se montra fort empressée : « Allons, cher frère, quand tu reviendras dans nos parages, n’oublie pas de passer chez nous ! » L’ecclésiastique se joignit à sa femme : « Viens nous voir, nous te recevrons toujours avec plaisir. » Le bourlak dit adieu à ses hôtes. La popadia voulut faire un pas de conduite à son prétendu frère et le pope tint aussi à accompagner le voyageur. Tous trois se mirent en route et, chemin faisant, la conversation ne languit pas entre eux. Quand on fut arrivé dans la campagne, la popadia dit à son mari : « Retourne à la maison, batouchka, tu n’as pas besoin d’aller plus avant, maintenant je reconduirai seule mon frère. » L’ecclésiastique re-

  1. Variante. — Quand la popadia eut régalé le moujik, elle lui dit : « Maintenant, viens dans ma chambre ; nous causerons de nos parents ; toi, mon frère, tu me mettras au courant de ton existence et je te raconterai la mienne. » Le bourlak la suivit dans la chambre, mais un soupçon entra dans l’âme du pope ; il s’approcha de la porte et regarda par la fente : le moujik était couché avec la popadia et la pressait à faire trembler le lit. À cette vue, le pope ne douta plus de son infortune conjugale, toutefois il n’osa pas surprendre les coupables : « Si je les dérange, » se dit-il, « le moujik me tuera avec son υιτ. Évidemment il n’y a rien à faire. »