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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/172

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CONTES SECRETS RUSSES

aperçut : « Pourquoi es-tu chagrin, Gricha ? Pourquoi baisses-tu la tête ? » Il lui raconta toute l’affaire. — « Ce n’est rien, Gricha, » reprit-elle, « j’arrangerai cela. Viens demain chez moi. Sois tranquille, elles ne se moqueront plus de toi. »

La vieille pratiquait la médecine, ce qui lui donnait beaucoup d’importance dans la localité, et les jeunes filles allaient chez elle à la veillée. Le soir, elle vit la paysanne qui avait ébruité l’affection déréglée de Grigorii pour sa jument. « Ma fille, » lui dit la vieille, « passe chez moi demain matin, j’aurai à te parler. — Bien, grand’mère. » Le lendemain, le jeune homme se leva, s’habilla et se rendit chez sa tante. « Allons, Gricha, tiens-toi prêt à fonctionner ; mais, pour le moment, mets-toi derrière le poêle et reste là bien tranquille jusqu’à ce que je t’appelle. » À peine avait-il pris place derrière le poêle, que la jeune paysanne arriva. « Bonjour, grand’mère. — Bonjour, ma colombe ! Voici ce que j’ai à te dire : tu files un mauvais coton ; tu es fort malade, ma chère ! — Eh ! grand’mère, il me semble que je me porte parfaitement. — Non, ma colombe, tu as un mal interne auquel on ne peut même penser sans frayeur ; maintenant, tu ne le sens pas ; mais quand cela sera parvenu au cœur, il n’y aura plus de remède, tu mourras ! Laisse-moi te tâter le ventre. — Tâte, grand’mère, » répondit la jeune fille ; peu s’en fallait qu’elle ne pleurât déjà, tant elle était effrayée. — « Vois-tu, je ne m’étais pas