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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/24

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CONTES SECRETS RUSSES

elle à la maison ? — Elle n’y est pas ! — C’est dommage ! Moi qui venais pour la besogner… et elle n’est pas chez elle ! » reprit le lièvre ; sur ce, il s’élança dans le bois.

La renarde avait tout entendu : « Ah ! fils de chienne, diable louche, » vociféra-t-elle, « attends un peu, effronté, je te ferai payer cher ton impudence ! » Elle descendit du poêle et se mit aux aguets derrière la porte, pensant que le lièvre ferait peut-être une nouvelle apparition. En effet, il ne tarda pas à revenir. « Bonjour, petits ; votre mère est-elle chez elle ? » demande-t-il aux renardeaux. — « Elle n’y est pas ! — Tant pis, » reprend le lièvre ; « je l’aurais régalée à ma façon ! » Soudain la renarde surgit devant lui : « Bonjour, mon cher ! » Le lièvre détale au plus vite, il court à perdre haleine, semant des crottes sur son chemin. La renarde le poursuit. « Non, diable louche, tu ne m’échapperas pas ! » Voilà qu’elle va l’atteindre ! Le lièvre fait un bond et saute au travers de deux bouleaux très rapprochés l’un de l’autre. La renarde veut l’imiter, mais elle reste prise entre les deux arbres, il ne lui est plus possible ni d’avancer ni de reculer, vainement elle s’épuise en efforts pour reconquérir sa liberté. Le louche regarde derrière lui, il voit ses affaires en bon train, revient vivement sur ses pas et prend son plaisir avec la renarde. « Voilà notre genre à nous autres, voilà notre manière », répète-t-il. Après avoir bien besogné, il se remet précipitamment en route.