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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/267

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CONTES SECRETS RUSSES

senterai chez lui et je lui ferai payer le tour qu’il m’a joué autrefois. »

Il se rendit au presbytère ; à ce moment le pope n’était pas chez lui, sa femme, seule, se trouvait à la maison. « Laisse-moi passer la journée chez toi, matouchka ! — Soit, entre ! ». Le paysan entra et s’assit sur un banc. « Comment t’appelle-t-on, mon cher ? D’où viens-tu ? » — « On m’appelle Kakofii, matouchka, et je viens de loin, je vais en pèlerinage. » Il y avait un livre sur la table du pope ; le moujik le prend, le feuillette, marmotte entre ses dents comme s’il lisait, puis fond en larmes. « Pourquoi pleures-tu, mon ami ? » lui demande la femme du pope. — « Comment ne pleurerais-je pas ? Il est dit dans la Sainte Écriture que chacun sera puni de ses péchés, et moi, pécheur, je commets tant de mauvaises actions, que je ne sais pas, matouchka, comment Dieu peut encore supporter mes fautes. — Tu sais lire et écrire, mon ami ? — Comment donc, matouchka ! Sous ce rapport, je n’ai pas à me plaindre de la Providence ! — Et connais-tu le chant d’église ? — Si je le connais ! Je crois bien, matouchka, je l’ai appris dès mon enfance ; je sais tout l’office ecclésiastique. — Eh bien ! mon ami, nous n’avons pas de chantre, le nôtre est allé enterrer son frère ; ne pourrais-tu pas, demain, prêter ton concours à mon mari pour la célébration de la messe ? — Certainement, matouchka, pourquoi pas ? »