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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/51

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CONTES SECRETS RUSSES

prit ? Avec lui, tu seras réduite à la mendicité ! — Sans doute, c’est ma destinée ! Si vous ne voulez pas me le choisir pour époux, j’irai me jeter à l’eau ou je me pendrai. »

Que faire ? Le vieillard qui, jusqu’alors, n’avait jamais admis en sa présence ce pauvre diable d’Ivan, alla lui-même lui offrir la main de sa fille. En entrant, il trouva le jeune homme occupé à raccommoder une vieille chaussure de tille. « Bonjour, Ivanouchka ! — « Bonjour, vieux ! — Qu’est-ce que tu fais-là ? — Je suis en train de raccommoder mes chaussures. — Des chaussures de tille ? tu devrais mettre des bottes neuves. — C’est à grand peine que j’ai pu réunir quinze kopeks pour acheter de la tille : comment me procurerais-je des bottes ? — Mais pourquoi ne te maries-tu pas, Vania ? — Qui est-ce qui me donnerait sa fille en mariage ? — Si tu veux, je te donnerai la mienne. Embrasse-moi sur la bouche ! »

Ce fut une affaire conclue. La noce fut célébrée en grande pompe et, après un plantureux repas, le garçon d’honneur conduisit les deux époux à la chambre nuptiale où il les laissa. Ivan montra aussitôt à sa femme que rien ne lui manquait. « Sotte, bête que je suis ! » pensa Dounia, quand elle eut reçu des preuves sensibles de la virilité de son mari ; « j’en ai fait une belle ! Puisque cela devait m’arriver, autant valait épouser un homme riche ! Mais où s’est-il procuré un υιτ ? Il but que je le sache ! » Et s’adressant à son époux : « Écoute,