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Page:Contes secrets Russes, 1891.djvu/65

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CONTES SECRETS RUSSES

sur les œufs. La paysanne, qui était une rusée commère, s’affubla d’un manteau et d’un bonnet empruntés à un ancien soldat, puis, sous ce déguisement, elle arriva à la maison et cria à plein gosier : « Eh, patron ! Où es-tu ? » Le paysan sauta à bas de la soupente et en même temps fit choir les œufs sur le parquet. « Qu’est-ce que tu fais ? — Monsieur le militaire, je garde la maison. — Mais est-ce que tu n’as pas de femme ? — Si, mais elle travaille dans les champs. — Et toi, pourquoi restes-tu au logis ? — Je couve des œufs. — Ah, fils de chien que tu es ! » Et les coups de fouet de pleuvoir sur la personne du moujik. « Ne reste pas à la maison, » continua le prétendu militaire, « ne couve pas d’œufs, mais travaille et laboure la terre ! — C’est ce que je ferai, batouchka, je travaillerai et je labourerai, je vous l’assure ! — Tu mens, drôle ! » et la femme se remit à battre son mari, après quoi, levant la jambe : « Regarde, fils de chien, » dit-elle, « j’ai été à la guerre et on m’a blessé, tu vois ; eh bien, est-ce que ma blessure pourra être guérie ? » Le moujik considéra le κον de sa femme et répondit : — « Elle se cicatrisera, batouchka. »

La paysanne sortit, alla reprendre les vêtements de son sexe et revint à la maison, où elle trouva son mari en train de gémir. — « Pourquoi geins-tu ? — Un soldat est venu tantôt et il m’a déchiré tout le corps à coups de fouet. — À cause ? — Il veut que je travaille. — Il y a longtemps que