Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/236

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jeune homme à celle de ses compagnes qui s’était placée près d’Émilie. — Oui, mon cousin, et c’est un correspondant très-exact, je vous assure ; il m’écrit régulièrement tous les deux jours.

— Comment se porte son oncle, Laura ? demanda l’autre dame.

— Un peu mieux ; mais, mon cher duc, faites-moi le plaisir de voir où est le marquis et miss Howard.

— Ramenez-les-nous, ajouta sa compagne.

— Sans doute, reprit la première en riant, et je vous assure qu’Eltringham vous en sera pour le moins aussi obligé que moi.

Quelques instants après, le duc revint accompagné d’un jeune homme d’environ trente ans, et d’une dame à qui on pouvait en donner cinquante sans lui faire tort.

Pendant cette courte conversation, que les Moseley se trouvaient à portée d’entendre, et qui excitait tout à la fois leur curiosité et leur surprise, Émilie jeta un coup d’œil à la dérobée sur celui qu’on appelait le duc, et elle se convainquit que ce n’était pas Denbigh : elle se sentit un peu soulagée ; mais quel fut son étonnement quand elle découvrit que la dame qui était assise près d’elle était la femme de celui dont elle s’était crue aimée ! La pauvre Émilie avait une âme trop noble pour éprouver une vile jalousie ; et, lorsqu’elle put se tourner sans affectation du côté de lady Laura, elle considéra avec un plaisir mélancolique ces traits charmants qui portaient l’empreinte de la douceur et de la franchise. Au moins, se dit-elle, j’espère qu’il s’amendera ; et, s’il s’amende, il peut encore être heureux.

Ce souhait généreux lui était inspiré par l’amour et par la reconnaissance, sentiments bien difficiles à arracher d’un cœur où ils ont pris racine. John ne voyait ces nouveaux venus qu’avec un déplaisir qu’il ne pouvait surmonter, et il se douta que miss Howard était la vieille fille de noce contre laquelle lord Henry s’était vainement récrié lorsqu’on avait soumis ce choix à son approbation.

Lady Jarvis, étonnée de se trouver rapprochée de personnes d’une si haute distinction, se retira à peu de distance pour étudier leurs manières et tâcher d’en faire son profit ; tandis que la douairière lady Chatterton, à la vue d’un duc et d’un marquis qui étaient encore à marier, soupirait profondément en pensant qu’il ne lui restait plus de fille à pourvoir. Le reste de la société les