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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/262

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lation de voir que la peine qu’elle avait causée bien innocemment à son cousin Chatterton s’effaçait tous les jours, tandis qu’un nouvel amour se glissait insensiblement dans son cœur.

Lady Henriette ne pouvait être comparée à Émilie, ni pour l’esprit ni pour la figure ; cependant elle avait presque effacé l’impression que cette dernière avait faite sur le cœur de son cousin.

On peut se rappeler que Chatterton, au désespoir du refus d’Émilie, avait quitté B***, accompagné de Denbigh.

En arrivant à Londres, il apprit que c’était par la protection du duc de Derwent qu’il avait obtenu la place qu’il sollicitait depuis longtemps. Ne sachant à quoi attribuer l’intérêt que Sa Grâce avait bien voulu prendre à lui, mais pénétré de reconnaissance, il s’empressa de se rendre dans le Westmoreland, où le duc résidait alors, pour la lui exprimer.

Son air triste, si différent de celui qu’ils croyaient voir à un homme qui venait d’obtenir un des plus brillants emplois de la cour, frappa également le duc de Derwent et sa sœur. L’intérêt qu’il lut dans leurs regards, le besoin d’épancher ses chagrins, et sa franchise naturelle, le portèrent à leur en confier la cause ; et un double désir s’alluma dans le cœur de lady Henriette : celui de connaître la femme qui avait pu résister à l’amabilité de Chatterton, et bien plus encore celui de le consoler d’un amour sans espoir. Les manières de lady Henriette, quoiqu’elles n’eussent rien de trop décidé, étaient remarquables par cette aisance que donnent une éducation distinguée et l’habitude du grand monde.

Mrs Wilson avait remarqué que sa conduite avec Chatterton avait quelque chose de plus que l’amabilité qu’elle déployait avec ses autres adorateurs ; et elle pensait que son cœur pourrait bien faire pencher la balance en faveur du jeune baron. Celui-ci, de son côté, avait jugé que le moyen le plus sûr pour éloigner Émilie de ses pensées était de tâcher de les diriger vers une autre femme ; et, pendant le séjour qu’il fit dans le Westmoreland, la présence de lady Henriette, si douce, si compatissante et si aimable, l’avait puissamment aidé à l’exécution de son plan curatif.

Dans sa lettre à Émilie, Chatterton lui parlait des obligations qu’il avait à Denbigh, qui avait contribué à calmer les souffrances d’un amour malheureux ; mais il ne disait pas de quelle nature étaient ces obligations, ni si son ami avait employé d’autres arguments que ceux que devaient lui dicter la raison et le bon