Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/274

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Le frère et la sœur paraissaient plongés dans leurs réflexions ; la jeune comtesse rompit la première le silence en disant :

— Il faut chercher à faire connaissance avec Mrs Wilson ; je sais qu’elle désire vivement vous voir, et l’amitié qui vous unissait au général exige que vous ayez des égards pour sa veuve.

— Je dois beaucoup au général Wilson, répondit Pendennyss d’un air pensif ; et lorsque nous serons à Annerdale-House, j’espère que vous ferez connaissance avec les dames de la famille Moseley, si elles viennent à Londres cet hiver ; mais vous oubliez, chère sœur, que vous avez aussi une lettre à me lire. La jeune comtesse jeta un coup d’œil rapide sur le contenu de l’épître d’Henriette, et se disposa à remplir sa part des conditions du traité.


« Ma chère cousine,

«  Frédéric a été si occupé de ses propres affaires, qu’il a oublié qu’il y eût dans le monde une créature qui se nomme sa sœur, ou plutôt il a tout oublié, à l’exception d’une certaine miss Émilie Moseley, de sorte qu’il m’a été impossible de venir vous voir comme je vous l’avais promis, puisque je n’avais point d’autre mentor convenable pour me conduire dans le pays de Galles… et… et… pour d’autres raisons que je ne vous dirai point, parce que je suis sûre que vous montrerez cette lettre au comte.

« Oui, ma chère, Frédéric Denbigh a supplié la fille d’un baronnet campagnard de devenir duchesse de Derwent, et, écoutez bien cela, mères qui faites la chasse aux maris pour vos filles, et vous, filles et veuves qui en cherchez pour votre compte, il l’en a suppliée en vain !

«  Je vous avoue que lorsque j’entendis parler pour la première fois de ce mariage, tout mon sang aristocratique bouillonna dans mes veines ; mais après un plus mûr examen, apprenant que la noblesse de sir Edward est ancienne et respectable, qu’il est de la famille des Chatterton, et trouvant dans la jeune personne tout ce que j’aurais pu désirer dans une sœur, mes scrupules orgueilleux s’évanouirent avec la sotte vanité qui les avait fait naître.

« D’ailleurs il était bien inutile de prendre l’alarme : Émilie refusa positivement la main de Derwent, et, ce qui est bien pis, elle fut sourde à toutes les sollicitations que je lui fis en sa faveur.