Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 1, 1839.djvu/331

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de l’aimer, Monsieur, et apprenez que j’ai promis à son père que cela serait.

— Si je vous ai bien compris ce matin, il me semble pourtant que l’amiral désapprouvait hautement les visites que je rendais à sa fille.

— Peu vous importe qu’il les approuve ou non, Monsieur ; ce ne sont pas vos affaires. Il est convenu qu’Isabelle sera votre femme, j’en ai donné ma parole, et si vous voulez que je vous regarde encore comme mon fils, vous voudrez bien, Monsieur, ne pas m’y faire manquer.

George s’attendait bien à découvrir que son père avait en quelques vues sur lui, mais non pas qu’il eût disposé de sa main d’une manière aussi formelle, sans même le consulter, et son ressentiment fut égal à la dissimulation qu’on avait montrée à son égard.

Importuner davantage Isabelle, c’eût été manquer à sa promesse ; trahir sa confiance, c’eût été une lâcheté… Il sortit le lendemain de grand matin, et, sans rien dire à son père, il alla trouver le duc de Derwent, son oncle ; il lui témoigna le désir d’être employé à un service actif, mais il lui fit entendre que la tendre sollicitude de lady Margaret ne voulait pas lui permettre d’en faire la demande. C’était la vérité, et George supplia son oncle de vouloir bien employer son crédit pour lui faire obtenir ce qu’il désirait.

Les bourgs appartenant au duc de Derwent étaient représentés au parlement par des membres entièrement dévoués à l’administration. La recommandation d’un homme qui envoyait six membres à la chambre des communes, et qui siégeait lui-même dans celle des pairs, devait être toute puissante. En moins de huit jours, George avait cessé d’être capitaine des gardes, et il avait été nommé lieutenant-colonel d’un régiment qui allait s’embarquer pour l’Amérique.

Sir Frédéric reconnut bientôt qu’il avait en tort de s’emporter ; il voulut revenir sur ses pas, et il chercha, à force d’indulgence et de caresses, à regagner le terrain que son imprudence lui avait fait perdre. Mais quel fut son courroux lorsque son fils lui annonça qu’il allait partir pour l’Amérique avec son nouveau régiment ! Il l’accabla des reproches les plus amers. Le fils chéri, qui n’était pas habitué à s’entendre traiter de la sorte, répondit