Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 10, 1839.djvu/194

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veaux préparatifs dans l’un des deux vaisseaux qui absorbaient toute son attention. Ils lui parurent être sans mouvement et également déserts. Il y avait, il est vrai, parmi les agrès de la Coquette, quelques objets indistincts qui pouvaient bien être des hommes ; mais l’éloignement empêchait Bonnie d’être certain de ce fait, et en admettant que ce fussent des matelots occupés, leur présence n’avait aucun résultat appréciable pour son œil ignorant. Après une minute ou deux, ces objets disparurent, quoique le noir attentif aperçût que les têtes de mâts et les agrès au-dessous semblaient entourés d’une masse plus épaisse de cordages. Dans ce moment une lueur sortit du nuage au-dessus du Rariton, et le son d’un tonnerre lointain résonna sur les eaux. Ce bruit parut être un signal pour le croiseur, car, lorsque l’œil de Bonnie, qui s’était dirigé vers le ciel, se tourna vers le bâtiment, il vit que la Coquette avait hissé et levé ses trois voiles de hune, et commençait à se mouvoir, comme un aigle qui étend ses ailes. Le vaisseau parut alors de plus en plus agité, car le vent venait par bouffées et le bâtiment se balançait légèrement, comme s’il eût essayé de se débarrasser de son ancre. Au moment précis où le vent changea et où la brise vint du nuage qui était à l’ouest, la Coquette s’élança hors de ses limites et parut pendant un instant aussi rétive qu’un coursier qui vient de briser ses liens. Elle vint pesamment se présenter au vent et resta balancée par l’action de ses voiles. Il y eut une ou deux autres minutes d’inactivité apparente, après lesquelles les larges surfaces des voiles de hune furent amenées en lignes parallèles. Une voile fut montée après l’autre sur le bâtiment, et Bonnie vit enfin la Coquette, le plus rapide croiseur de la couronne dans ces mers, s’élancer sous un nuage de voiles.

Pendant ce temps, le brigantin était tranquillement à l’ancre dans le Cove. Lorsque le vent se fit sentir, sa carène légère se balança dans les courants, et l’on vit la dame Vert-de-Mer présenter ses joues bronzées à la brise. Mais elle seule paraissait veiller à la fortune de ses protégés, car on ne voyait personne s’occuper du danger qui commençait à menacer si sérieusement l’équipage, danger qui venait autant de l’état des cieux que d’un ennemi non moins redoutable et plus intelligent.

Comme le vent était frais, quoique indécis, la Coquette voguait sur l’onde avec une rapidité qui ne faisait aucun tort à la réputa-