Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 10, 1839.djvu/212

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nemi. Quoique j’aie quelque expérience, je n’ai jamais vu le fils d’un lord plus sûr d’une promotion que ce brigantin ne semble de ses talons ! Si le vaisseau français reste quelque temps de ce côté, nous pourrons le regarder honnêtement sous le nez ; car ces gens-là ne portent jamais leurs véritables couleurs à bord, comme de francs Anglais. Eh bien ! Monsieur, comme je vous le disais, ce corsaire, si corsaire il y a, a plus de foi dans ses voiles que dans l’Église. Je ne fais aucun doute, capitaine Ludlow, que le brigantin ne traversât le passage, tandis que nous ployions nos voiles de hune, hier, car je ne suis pas de ceux qui se dépêchent de donner crédit aux histoires surnaturelles ; outre cela, j’ai sondé le passage de mes propres mains, et je sais que la chose est possible, lorsque le vent souffle pesamment sur le couronnement. Cependant, Monsieur, la nature humaine est la nature humaine ; et le plus vieux marin, qu’est-il après tout ? un homme ! Ainsi, pour en finir, j’aimerais mieux dans tous les temps donner la chasse à un vaisseau français, dont les intentions me sont connues, que de courir pendant quarante-huit heures dans le sillage d’un de ces bâtiments qui fuient comme l’oiseau, avec peu d’espérance de le héler.

— Vous oubliez, master Trysail, que j’ai été à bord de ce bâtiment, et que je connais la manière dont il est construit ainsi que son caractère.

— On le dit ici, reprit le vieux marin en s’approchant plus près de son capitaine avec un sentiment de curiosité, quoique personne ne connaisse les particularités de cette visite. Je ne suis pas de ceux qui font des questions impertinentes, surtout sous le pavillon de la reine, et mon plus grand ennemi ne pourrait m’accuser d’avoir la curiosité d’une femme. On peut croire qu’on voit des choses bien travaillées à bord d’un bâtiment dont l’extérieur est si élégant !

— Il est parfait dans sa construction, et admirable dans ses agrès.

— Je le pensais, par instinct ! Son commandant n’en devrait être que plus attentif à le garantir des écueils. La plus jolie jeune femme de notre paroisse fit naufrage, pour avoir fait une croisière de trop avec le fils de l’Esquire. C’était une charmante fille, quoi qu’elle ait déserté ses anciennes compagnes lorsque le jeune lord tomba dans son sillage. Elle se conduisit bravement, Monsieur, tant qu’elle put porter ses voiles et aller avec le vent ; mais