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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 10, 1839.djvu/221

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de mon vieil ami Stephane van Staats je vais hasarder une prophétie. Vous vous marierez, monsieur van Staats, oui, vous vous marierez avec… La prudence m’empêche de dire avec qui vous vous marierez, mais vous pouvez vous regarder comme heureux, si ce n’est pas avec une femme pour laquelle vous quitterez maison, patrie, amis, manoir et rentes, enfin tous les biens solides de la vie. Je ne serais pas surpris d’entendre dire que la prédiction de Poughkeepsie le devin est accomplie.

— Et quelle est votre opinion réelle, alderman, sur les événements mystérieux dont nous avons été témoins ? demanda le patron avec une émotion prouvant que l’intérêt qu’il portait à ce sujet adoucissait le regret qu’il aurait ressenti sans cela d’une prophétie si peu aimable. La dame Vert-de-Mer n’est point une femme commune ?

— Vert de mer et bleu de ciel ! interrompit l’impatient bourgeois : la coquine n’est que trop commune, Monsieur, et voilà le mal. Si elle eût été satisfaite de commercer d’une manière raisonnable et secrète, et de gagner de nouveau la pleine mer, nous n’aurions en aucune de ses folies pour déranger des affaires qui auraient dû être regardées comme terminées. Monsieur van Staats, voulez-vous me permettre de vous adresser quelques questions directes, si vous avez le loisir de me répondre ?

Le patron fit un signe d’assentiment.

— Que pensez-vous que soit devenue ma nièce ?

— Elle a été enlevée.

— Et par qui ?

Van Staats étendit un de ses bras vers la mer et fit un nouveau signe. L’alderman réfléchit un instant, et se mit à rire, comme si une idée gaie l’eût emporté sur sa mauvaise humeur.

— Allons, allons, patron, dit-il avec le ton aimable qu’il se croyait obligé de prendre en s’adressant au possesseur de cent mille acres, cette affaire est comme un compte compliqué, et un peu difficile, jusqu’à ce qu’on ait recours aux livres ; alors tout devient aussi clair que le jour. Il y eut des arbitres dans l’arrangement des affaires de Kobus van Klinck, que je ne veux pas nommer ; mais soit la mauvaise écriture du vieil épicier, soit quelque inexactitude dans les chiffres, ils eurent beaucoup de peine à découvrir de quel côté penchait la balance ; enfin, en y mettant beaucoup de bonne volonté, ce que doit toujours faire un