Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 10, 1839.djvu/287

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pensif plutôt qu’impatient, et lorsqu’il entendit des pas à la porte de l’appartement, son visage trahit les symptômes d’une agitation violente. La négresse d’Alida parut, remit un papier à Seadrift et se retira. L’ardent marin lut les mots suivants, écrits à la hâte avec un crayon.

« J’ai éludé toutes les questions, et il est à moitié disposé à croire à la nécromancie. Ce n’est pas le moment d’avouer la vérité, car il n’est pas en état de l’entendre, étant déjà troublé par l’inquiétude de l’effet que peut produire la présence du brigantin dans le Cove, et si près de sa propre demeure ; mais soyez certain qu’il reconnaîtra des droits que je saurai soutenir, et si j’échouais dans le projet de les établir, il n’oserait refuser le témoignage du redoutable Écumeur de mer. Venez ici dès que vous entendrez le bruit de ses pas. »

Cette dernière injonction fut promptement suivie. L’alderman entra par une porte, et l’actif marin se sauva par une autre ; le prudent alderman trouva vide un appartement où il avait espéré rencontrer son hôte. Cette dernière circonstance néanmoins causa peu de surprise à Myndert, et point de chagrin, à en juger par l’indifférence avec laquelle il nota cet incident.

— Femmes et folies ! pensa l’alderman plutôt qu’il ne murmura, cette jeune fille fait tous les détours d’un renard qui est poursuivi, et il serait plus facile de convaincre d’une fausse facture un marchand qui attache quelque importance à sa réputation, que de convaincre d’une indiscrétion cette rusée de dix-neuf ans ! Il y a en elle tant de sang normand, qu’on n’ose pas trop la pousser à bout ; mais voyez ! lorsque j’espérais que van Staats avait profité de l’occasion, l’étourdie a l’air d’une nonne lorsque je prononce son nom. Il faut convenir qu’Oloff n’est point un Cupidon ; car pendant une semaine, sur mer, il aurait pu gagner le cœur d’une sirène. Eh ! voilà encore des inquiétudes par le retour du brigantin et les notions que le jeune Ludlow a de son devoir. Vie et mortalité ! il faut quitter le commerce dans un temps ou dans un autre, et commencer à fermer le livre de la vie ; il faut que je pense sérieusement à une balance finale. Si la somme totale était un peu plus en ma faveur, je le ferais demain avec joie.