Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 11, 1839.djvu/56

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as parlé dernièrement avec gratitude, a plus encore à se plaindre que toi de ces décrets sévères.

— Mon chagrin augmenterait encore, si je croyais qu’un jeune homme qui a montré tant de courage en ma faveur eût des raisons de redouter cette sévérité, reprit vivement Violetta. Quelle est l’affaire qui si heureusement pour moi a conduit le seigneur de Sainte-Agathe à Venise ? Une jeune fille reconnaissante peut, je crois, le demander sans scrupule.

— L’intérêt que tu lui portes est aussi naturel que recommandable, répondit le carme avec une simplicité qui faisait plus d’honneur à son caractère qu’à sa pénétration. Il est jeune, et sans doute il est conduit par sa fortune et les passions de son âge à bien des actes de faiblesse ; souviens-toi de lui, ma fille, dans tes prières, afin de lui payer ainsi ta reconnaissance. Ses affaires en cette ville sont de notoriété publique, et ton ignorance sur ce point ne vient que de la vie retirée que tu mènes.

— Mon élève a d’autres objets pour occuper ses pensées que les intérêts d’un jeune étranger qui vient à Venise pour ses affaires, observe donna Florinda.

— Mais si je dois me souvenir de lui dans mes prières, mon père, je désirerais savoir d’abord ce dont le jeune noble a le plus besoin.

— Souviens-toi seulement de ses besoins spirituels ; car il possède les biens que ce monde peut offrir, quoique souvent l’homme qui est le plus riche soit celui dont les désirs spot le moins satisfaits. Il paraît qu’un des ancêtres de don Camillo fut autrefois sénateur à Venise, et que la mort d’un parent mit en sa possession plusieurs seigneuries de la Calabre. Les plus jeune de ses fils, par un décret spécial rendu en faveur d’une famille qui avait bien servi l’État, entra en jouissance de ces domaines, tandis que l’aîné transmit son rang de sénateur et sa fortune sur le territoire de Venise à sa postérité. Le temps a éteint la branche aînée, et don Camillo, depuis des années, assiège le conseil pour être rétabli dans les droits auxquels son ancêtre avait renoncé.

— Peut-on le refuser ?

— Cette demande exige qu’on renonce pour lui aux lois établies. S’il abandonnait les seigneuries de Calabre, le Napolitain y perdrait plus qu’il n’y gagnerait. Garder ces seigneuries et celles que sa famille possédait sur le territoire de la république serait