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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/192

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considérable, les jeunes gens avaient perdu tant de temps à folâtrer le long de la route et à cueillir des fleurs sur le penchant de la colline, qu’Ulrike avait eu le temps d’écouter comment Ilse avait disposé de sa pupille, et de suivre sa fille à la chaumière, avant que la conversation fût bien avancée. L’entrevue des deux mères fut comme à l’ordinaire celle de deux amies affectueuses. Lorsque les questions habituelles furent épuisées, et que quelques observations insignifiantes eurent été faites par les jeunes filles, le jeune groupe fut congédié sous le prétexte de conduire Meta voir la manière dont Berchthold avait arrangé les nids pour les tourterelles dont la fille du bourgmestre avait fait présent à Lottchen. Les deux mères virent partir leurs enfants, toujours accompagnés de Gisela, avec satisfaction, car l’une et l’autre avaient besoin d’une conférence secrète, et toutes les deux savaient combien les jeunes gens sont enclins à prolonger leurs moments de liberté par les mille petits moyens qui forment l’innocente coquetterie de l’amour.

Lorsque Ulrike et Lottchen se trouvèrent seules, elles restèrent quelque temps les mains entrelacées, se regardant l’une et l’autre avec intérêt.

— Tu as bien passé la saison inconstante du printemps, bonne Lottchen, dit Ulrike avec affection. Je n’ai plus d’inquiétude que ta santé souffre de l’humidité de cette chaumière.

— Et tu es toujours jeune et belle, comme dans le temps où, fraîches et gaies comme Meta, nous courions sur la bruyère de l’Heidenmauer. De tout ce que j’ai connu, Ulrike, tu es ce qui a le moins changé, soit de forme, soit de cœur.

La douce étreinte qui se fit sentir avant que leurs mains se séparassent, fut un gage silencieux de leur mutuelle estime.

— Tu trouvés Meta fraîche et heureuse ?

— Comme elle mérite de l’être.

— Et Berchthold ? Je crois qu’il avance tous les jours dans les bonnes grâces de son seigneur.

— Il est tout ce que je désire qu’il soit : il ne lui manque qu’une chose, mon amie, et tu sais bien que je ne la lui désire que pour satisfaire les préjugés d’Heinrich.

— Mon fils est à jamais sans espoir de fortune : Berchthold a une trop généreuse indifférence de l’or pour en amasser même si cela était en son pouvoir. Mais quel espoir existe-t-il pour un