Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/208

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Ses yeux ne pouvaient pas s’arrêter sur la vieille nourrice, mais ils étaient fixés sur le visage de la jeune beauté, outre bien d’autres légèretés encore. Oh ! je le reconnus promptement pour ce qu’il était.

— Il avait des qualités et les défauts qui leur sont opposés.

— Bien pis que cela. Cent fois pis ! je puis vous indiquer bien facilement ses défauts : d’abord, c’était un libertin, il ne manquait jamais une occasion de débauche avec les moines qu’il a outragés.

— Je n’en ai jamais entendu parler.

— Est-il raisonnable de supposer autre chose après ce que nous savons avec certitude ? Parlez-moi seulement d’un vice bien prononcé dans un homme, et je vous montrerai tous ceux qui l’accompagnent.

— Cela peut-il être vrai ? Ne devrions-nous pas plutôt penser que la plupart des hommes cèdent facilement aux choses vers lesquelles leurs propres passions les portent, tandis qu’ils résistent mieux à celles pour lesquelles ils éprouvent moins de penchant ? Il peut être vrai qu’il y ait telles fautes qui rendent ceux qui les commettent indifférents à l’opinion du monde qui les condamne ; mais j’espère qu’il y a peu d’hommes assez misérables pour renoncer à toute estime.

— Si vous aviez jamais vu un siège, Ulrike, vous ne parleriez pas ainsi. Voilà l’ennemi de l’autre côté du fossé, jurant, criant, faisant tout son possible pour alarmer la garnison ; je ne parle que de ce que j’ai vu trois fois dans notre ville de Duerckheim. Tant que la brèche n’est pas pratiquée et que les échelles ne sont pas placées, chacun va tranquillement dans les rues. Mais que l’ennemi entre une fois, soit par une fenêtre, soit par une cheminée, les portes volent, les piliers sont renversés, les cavaliers, les fantassins se heurtent jusqu’à ce que pas une maison n’échappe aux pillards et que pas un sanctuaire ne soit violé. Maintenant ce blasphème du seigneur Odo ressemble à une muraille qui s’est tout d’un coup abattue, laissant entrer tous les bataillons et tous les escadrons des vices.

— Sa faute fut grande, cela est certain, et le châtiment fut sévère. Cependant on peut attribuer sa faute à un moment de folie ou à un ressentiment provoqué.

— Ce fut un blasphème, et il fut puni comme tel ; pourquoi