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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/217

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pureté, avec une foi parfaite. Le respect que dans ma pénitence et ma vie solitaire j’accorde à ces signes sacrés n’est pas plus profond ou plus fervent que celui que j’éprouvais pour votre innocence virginale.

Ulrike trembla, mais ce n’était que le balancement de la feuille au passage du souffle de l’air.

— Je reconnais la vérité de vos paroles, murmura-t-elle, comme effrayée de hasarder le son de sa voix.

— Vous me rendîtes justice. Lorsque vos parents consentirent à notre union, je plaçai toutes mes espérances dans le mariage, car, tout jeune que j’étais, je me connaissais si bien, que je prévoyais qu’un esprit persuasif, bon, et cependant ferme comme le vôtre, était nécessaire pour dompter mon caractère. Une femme subjugue le cœur d’un homme par sa tendresse, par sa dépendance même, et elle obtient tout ce que la fierté de l’autre sexe refuserait à un pouvoir plus évident.

— Éprouviez-vous réellement tous ces sentiments ?

— Ulrike, j’éprouvais plus, j’étais convaincu de plus de choses, et j’en craignais plus encore que je n’aurais osé l’exprimer ; mais tout sentiment de fierté est passé maintenant. Que dirai-je de plus ? Vous savez de quelle manière des esprits hardis commencèrent à discuter sur les mystères et les dogmes de l’Église vénérable qui depuis longtemps gouverne la chrétienté, et que quelques-uns furent assez téméraires pour anticiper sur les raisonnements et les changements des têtes plus prudentes, par des actes audacieux. Il en est toujours ainsi des réformateurs d’abus, jeunes, et dont l’imagination est exaltée. Ne voyant rien que les torts, ils oublient les moyens par lesquels ils sont produits, et ne s’aperçoivent pas des causes qui peuvent adoucir, sinon justifier le mal.

— Et malheureusement c’était là votre caractère ?

— Je ne puis le nier. Jeune et sans connaissance des diverses causes qui tempèrent chaque théorie lorsqu’elle est mise en pratique, je n’envisageais que le but.

Bien qu’Ulrike attendit avec impatience quelques excuses du pénitent sur ses propres fautes, elle continua de garder le silence. Après quelques minutes de réflexion la conversation continua :

— Il y avait parmi vos amis, Odo, des personnes qui pensèrent que l’outrage fut moins grand que le couvent ne le rapportait.