Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/269

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ne pas recueillir les fruits qu’il s’en était promis. Il en avait bien pesé toutes les conséquences temporelles ; mais l’attitude immobile du père Johan, la présence de reliques longtemps révérées, et les anathèmes de l’Église, exerçaient encore une sorte de prestige sur un esprit qui n’était pas assez éclairé pour en être entièrement à l’abri. Il fut tiré de cet état de malaise par le bruit du marteau qui résonnait dans les caveaux. Le comte se hâta d’y descendre, suivi d’Heinrich et de Berchthold. On se rappelle que c’était là que se trouvaient les tombeaux et la chapelle de sa famille ; une brillante clarté y était répandue, et, comme en haut, tout y était dans la confusion. Déjà la plupart des mausolées avaient subi de cruelles mutilations, et aucune chapelle n’avait été respectée. Cependant Albrecht de Viederbach était debout devant celle d’Hartenbourg, les bras croisés et l’air soucieux. Le manteau qui, dans le commencement de l’attaque, lui avait servi à cacher sa personne, était alors négligemment rejeté en arrière, et les méditations dans lesquelles il était plongé semblaient lui avoir fait oublier la prudence.

— Nous voici donc enfin arrivés aux monuments de nos pères, cousin ! dit le comte en le joignant.

— À leurs ossements même, noble Emich !

— Voilà longtemps que les dignes chevaliers dorment en mauvaise compagnie, ils se trouveront mieux dans la chapelle d’Hartenbourg.

— Dieu veuille que cette entreprise n’ait rien que de légitime !

— Comment ! en douteriez-vous, quand tout est à peu près fini ?

— Par la messe ! il siérait mieux à un soldat de Rhodes de combattre les infidèles que de troubler ainsi subitement le sommeil de ses illustres ancêtres !

— Vous pouvez vous retirer dans mon château, seigneur Albrecht, si votre bras est fatigué, dit Emich avec froideur ; une malédiction ne saurait vous y atteindre.

— Ce serait mal reconnaître une généreuse hospitalité, cousin ; le chevalier qui voyage se doit tout entier à l’ami qui le reçoit, et jamais il ne fait de retraite qui ne soit honorable. Je ne vous quitterai pas, Emich, ainsi n’en parlons plus. Cette image n’est-elle pas celle du bon évêque que nous comptons parmi nos ancêtres ?

— Mais oui, je crois qu’il était revêtu de quelque dignité de