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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/270

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ce genre. Au reste, dites de lui ce que vous voudrez ; on ne dira pas du moins que c’était un bénédictin.

— Il eût mieux valu, cousin, puisque cette église devait être saccagée, que nos pères eussent choisi un autre asile pour leur sépulture. En vérité, nous autres soldats de profession, nous menons une singulière existence, et pour nous les jours ne se ressemblent guère. Il y a un an à peu près que, en brave et loyal chevalier de Rhodes, je me mis dans l’eau jusqu’aux genoux pour ouvrir une tranchée contre les sectateurs des houris, et aujourd’hui je me trouve ici en qualité de spectateur, c’est le nom le plus honnête qu’on puisse me donner, pendant qu’un autel chrétien est renversé, et qu’une communauté de moines, chassée de sa retraite, est réduite à errer sur la terre, comme une bande de vagabonds !

— Par les trois rois ! mon cousin, votre comparaison est parfaitement juste ; car c’était bien un tas de vagabonds qui auraient voulu prendre toute la société dans leurs filets. Ah ! forgeron, mon ami, épargnez l’ange de mon grand-père ! s’écria Emich en s’interrompant ; si cette image possède quelque vertu, c’est notre maison qui en profite !

Dietrich avait déjà le marteau levé, mais il en changea la direction, et il le laissa tomber sur une autre sculpture. Le marbre volait en éclats sous chaque coup qu’assénait son bras de fer, et bientôt les chefs remontèrent dans l’église pour respirer un moment.

Il ne restait plus de doute sur le sort de ces bâtiments depuis si longtemps célèbres. Ce n’étaient de tous côtés que tombeaux foulés aux pieds, que monuments détruits, qu’autels renversés, que chapelles saccagées, et tous les objets qui semblaient pouvoir résister le moins du monde à l’action du feu avaient éprouvé de si rudes échecs, qu’il n’était point probable qu’ils pussent jamais être restaurés.

Pendant ce temps, l’incendie s’était propagé avec cette rapidité dévorante qui signale toujours la marche de ce fléau destructeur. La plupart des dortoirs, des cuisines, des bâtiments intérieurs étaient consumés ; le feu avait dévoré tout ce qui lui offrait quelque aliment, et l’église elle-même, envahie par les flammes, menaçait de s’écrouler bientôt.

Emich et ses compagnons, qui venaient de remonter, étaient