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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/27

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oiseau gazouillant parmi les arbres, ni un hibou criant sur les hauteurs. Une fois, et pendant une minute seulement, un chevreuil s’aventura hors de la feuillée, et descendit pour se désaltérer au ruisseau. Cet animal n’avait pas les mouvements élastiques, la marche timide et irrésolue du daim d’Amérique ; mais c’était néanmoins un véritable habitant des forêts, car s’il se confiait en quelque sorte à la protection de l’homme, il fuyait son pouvoir. Aussitôt que sa soif fut apaisée, il écouta avec cette finesse d’instinct qu’aucune circonstance accidentelle ne peut détruire et remonta sur la hauteur, s’enfonçant sous la forêt d’un pas troublé. Au même instant un chien de chasse s’élança du milieu des arbres, de l’autre côté de la gorge, dans le sentier, et bondit en avant et en arrière, à la manière bien connue des chiens de cette espèce avant qu’ils soient animés par l’ardeur de la chasse. Un coup de sifflet rappela l’animal près de son maître, et ce dernier parut dans le sentier.

Une toque de velours vert sur laquelle était brodé un cor de chasse, une blouse de la même couleur, d’une étoffe commune, mais propre, sur laquelle on voyait le même ornement, enfin l’instrument lui-même suspendu sur une épaule, et les armes habituelles à un homme de cette classe, annonçaient un forestier, individu chargé du soin des chasses et d’une juridiction dans la forêt ; fonctions qui ont été bien, dégradées par l’usage de la dénomination habituelle de garde-chasse.

Le forestier était jeune, actif, et, malgré ses habits, communs, son extérieur était engageant. Appuyant son fusil contre la racine d’un arbre, il siffla de nouveau pour appeler le chien, et renouvela l’appel, en se servant d’un instrument aigu, qu’il portait dans cette intention ; il parvint promptement à faire revenir son compagnon à ses côtés. Accouplant les lévriers avec une laisse qu’il attacha autour de lui, il détacha son cor, et fit entendre des sons qui résonnèrent harmonieusement dans la vallée. Lorsque l’instrument quitta ses lèvres, le jeune homme écouta, jusqu’à ce que le dernier écho, lointain eût répété ses sons, comme s’il espérait une réponse. Il ne fut pas trompé dans son attente. Bientôt de nouveaux sons parvinrent jusqu’au sentier au milieu des bois, et y firent battre d’effroi les cœurs de leurs habitants. Les sens de l’instrument invisible étaient bien plus perçants et sauvages que ceux du cor de chasse, mais ils ne manquaient ni de mélancolie