Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/29

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tiaux depuis plus longtemps que les Frédérics ne sont électeurs !

Le forestier fit un geste d’impatience, caressa ses chiens, et attendit l’effet de la nouvelle fanfare pour laquelle son compagnon se préparait. Gottlob semblait avoir une entière confiance dans ses talents pour appeler son troupeau, car, malgré ses paroles, ses manières n’avaient exprimé aucune crainte sur le sort des animaux qui lui étaient confiés. La vallée résonna bientôt des sons plaintifs et sauvages produits par l’instrument de merisier. Le rustre prenait soin de donner à ses sons les intonations qui, par une convention tacite, avaient, de temps immémorial, servi de signal pour rassembler un troupeau égaré. Son talent et sa confiance furent promptement récompensés, et les vaches, les unes après les autres, sortirent de la forêt et entrèrent dans le sentier, les plus jeunes bondissant lourdement le long du chemin, tandis que les plus paisibles habitants de la laiterie avançaient d’un air affairé, mais d’un pas grave, comme il convenait à leurs années et à leur réputation au hameau. En quelques minutes elles furent toutes rassemblées autour de leur gardien, qui, les ayant comptées, remit son cor sur son épaule et se disposa à se rendre à l’autre extrémité du ravin.

— Tu es heureux d’avoir rassemblé tes vaches si promptement et avec si peu de peine, Gottlob, dit le forestier en suivant le troupeau avec son compagnon.

— Dites habile, maître Berchthold, et ne craignez pas de me donner trop d’amour-propre. Il n’y a aucun danger de me faire tort en reconnaissant mon mérite. Il ne faut jamais décourager la modestie par une discrétion trop scrupuleuse. Ce serait un miracle dans le village si un troupeau nourri dans les voies de l’Église oubliait son devoir !

Le forestier sourit ; mais il tourna le visage comme un homme qui est aveugle pour ce qu’il ne désire pas voir.

— Voilà de tes tours, ami Gottlob ; tu as laissé tes vaches rôder sur les terres des frères !

— J’ai payé le denier de saint Pierre ; j’ai été à la chapelle de saint Benoît faire une prière ; je me suis confessé au père Arnolph lui-même, et tout cela pendant le mois. Qu’est-ce qu’un homme peut faire de plus pour entrer en faveur auprès des bons frères ?

— Je voudrais savoir si tu as jamais entretenu le père Arnolph