Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/322

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ce siècle, le pillage était un des moyens les plus commodes et les plus usités de s’enrichir. Il regarda fièrement l’implacable abbé, mais sans lui adresser directement la parole.

— Je n’ai rien de plus, dit-il. Les guerres, les charges de ma maison, l’or donné à la communauté qui a été ravagée, m’ont laissé pauvre.

Le trésorier se tourna du côté d’Heinrich avec une expression de physionomie très-éloquente.

— Vous ferez attention, maître trésorier, dit le bourgmestre, qu’il ne s’agit plus d’un haut et puissant baron, mais que le peu que j’ai à donner provient d’une pauvre ville qui a de rudes charges. D’abord, nous offrons nos vœux et nos prières ; ensuite nous présentons en toute humilité, et dans l’espoir qu’elles vous seront agréables, ces cuillers qui pourront servir dans l’une ou l’autre de vos nombreuses cérémonies ; puis ce petit chandelier que des joailliers de Francfort ont garanti être d’or pur ; et enfin cette corde, avec laquelle sept de nos principaux citoyens se sont vertement et loyalement donné la discipline, en expiation du mal fait à vos frères.

Toutes ces offrandes furent gracieusement reçues, et le moine se tourna du côté des autres pèlerins : il n’est pas nécessaire de passer en revue les différentes offrandes qui furent faites par chacun d’eux. Celle de Gottlob se composait, du moins à ce qu’il disait, du cor maudit qui avait retenti si fatalement près de l’autel de Limbourg, — et d’une pièce d’or. Cette pièce était celle qu’il avait reçue de Boniface, dans l’entrevue qui avait amené son arrestation. Quant au cor, c’était un instrument de rebut que le rusé vacher avait essayé souvent au milieu de ses montagnes, sans le moindre succès. Dans la suite, lorsque l’esprit d’opposition religieuse eut pris plus d’audace, il se vantait du tour qu’il avait joué aux bénédictins en leur donnant un instrument dont on ne pouvait tirer aucun parti.

Ulrike offrit son présent dans un esprit de pénitence humble et sincère. C’était une robe pour l’image de la Vierge, qui avait été brodée par elle-même, et que la piété de ses concitoyennes avait contribué à enrichir de pierres de quelque prix. Le don fut accepté avec bienveillance ; car la communauté avait reçu des renseignements précis sur le caractère des divers pénitents.