Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/368

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blé par le chagrin réel que lui causait la perte de son ami, qu’il ne pouvait trouver de consolation dans son avancement.

— Mes services sont à mon seigneur comte, répondit-il ; mais quoique je sois prêt à faire ce qui m’est commandé, je souhaiterais de tout mon cœur que Berchthold fût ici pour reprendre le service à ma place.

— Écoutez ! écoutez ! crièrent cent voix différentes.

Emich tressaillit et avança la tête d’un air attentif. Le jour était clair et sans nuages, et l’air des montagnes aussi pur qu’une douce brise et un soleil brillant pouvaient le faire supposer. Au milieu de ce silence éloquent et favorisé par de telles circonstances, on entendit à travers la vallée les cris bien connus d’une meute à la piste. Dans ce pays et dans ce siècle personne n’osait chasser, et personne en effet n’en possédait les moyens, si ce n’était le seigneur féodal. Depuis les derniers événements les forêts avaient été abandonnées ; et à la mort de Berchthold, qui jouissait du privilège spécial des chasses, personne n’avait osé suivre ses habitudes.

— Ceci est au moins hardi ! dit Emich lorsque les cris eurent cessé. Quelqu’un a-t-il des chiens de cette noble race ?

— Nous n’en avons jamais entendu parler. Personne n’oserait s’en servir. — Telles furent les réponses qu’il reçut.

— Je connais ces voix, ce sont certainement les chiens favoris de mon pauvre forestier ; les chiens n’ont-ils pas rompu leur laisse pour s’amuser au milieu des forêts parmi les cerfs ?

— Dans ce cas, seigneur comte, des chiens fatigués resteraient-ils dehors pendant des semaines entières ? répondit Gottlob. Voilà quinze jours que ces cris ont été entendus pour la première fois, et cependant personne n’a revu les chiens depuis ce moment jusqu’à présent, à moins que, comme le disent quelques paysans, ils n’aient été vus poursuivant le gibier.

— Ou ajoute, mon seigneur comte, dit un autre, qu’on a vu Berchthold lui-même dans leur compagnie. Ses vêtements flottaient au gré des vents tandis qu’il courait ; il suivait le pas des chiens comme si ses membres avaient été aussi agiles que les leurs.

— Et le père Johan à ses talons, le capuchon sur les épaules et sa robe voltigeant comme un drapeau, par forme d’amusement religieux, ajouta le comte en riant. N’as-tu pas vu, radoteur, que