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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/50

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— Tu t’appelles Gottlob, mais ce nom appartient à bien des chrétiens.

— Il y en a plus qui le portent, révérend père, qu’il n’y en a qui lui font honneur. Il y a Gottlob Frincke, le plus grand coquin de Duerckheim ; Gottlob Popp n’a pas grand respect pour les vœux qu’on fit pour lui au baptême ; quant à Gottlob de Manheim…

— Nous passerons sous silence les méfaits de tous ceux qui restent, en faveur du bien que tu as fait à ce nom, interrompit le bénédictin, qui, ayant cédé insensiblement, dès le commencement de l’entrevue, au plaisir de la flatterie, devenait honteux de sa faiblesse à mesure que le prolixe gardeur de bestiaux bavardait de manière à exciter le soupçon sur la qualité des louanges qu’il prodiguait. Venez à moi lorsque vous le jugerez à propos, mon fils ; et tous les conseils qu’un pauvre esprit, mais un cœur sincère, peuvent donner, vous les recevrez de moi.

— Comme ces paroles soulageraient le cœur de ma pauvre mère si elle pouvait les entendre ! — Gottlob, disait-elle…

— Que sont devenus tes compagnons et la jeune fille ? demanda vivement le bénédictin.

Comme le vacher venait de terminer son rôle avec succès, il se retira à l’écart avec un air de simplicité et d’étonnement, laissant la conversation se continuer entre le moine et le solitaire.

— Tes hôtes nous ont subitement quittés, continua le premier après s’être convaincu que personne ne restait dans la hutte que lui, le solitaire et le beau parleur Gottlob.

— Ils sont partis comme ils étaient venus, volontairement et sans être questionnés.

— Tu les connais, mon père, ils te font de fréquentes visites ?

— Frère, je te répète que je ne questionne personne. Si l’Électeur Frédéric venait dans ma demeure, il serait le bienvenu ; le gardeur de bestiaux ne l’est pas moins. À tous les deux, en partant, je dirais seulement : Dieu vous accompagne !

— Tu gardes les bestiaux des bourgeois, Gottlob ?

— Révérend père, je garde le troupeau qu’il convient à mes maîtres de confier à mes soins.

— Nous avons de graves sujets de plainte contre un de tes compagnons, qui sert le comte d’Hartenbourg, et qui a l’habitude