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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/49

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— Tu n’as pas même la tonsure, dit-il, tandis que ses regards incertains s’arrêtaient alternativement sur le solitaire et sur l’étrangère, qui s’était éloignée autant que l’étroite cellule pouvait le lui permettre.

— Tu le vois, mon père, j’ai tous les cheveux que le temps et les infirmités m’ont laissés. Mais croit-on, dans ta riche et belliqueuse abbaye, que les avis d’un homme qui a assez vécu pour reconnaître ses erreurs et s’en repentir peuvent faire tort à la jeunesse sans expérience ? Si malheureusement je me suis trompé, vous arrivez à temps, révérend moine, pour réparer mes torts.

— Que la jeune fille vienne au confessionnal de l’église de l’abbaye, si les chagrins ou les remords pèsent sur son âme ; elle y trouvera, sans aucun doute, du soulagement à ses peines.

— Je puis en répondre par expérience, interrompit brusquement le gardeur de bestiaux, qui s’était avancé entre les deux hommes de Dieu, de manière à attirer sur lui toute leur attention.

— Va sur la montagne rendre le repos à ton âme, Gottlob, a l’habitude de dire ma bonne et vénérable mère lorsque l’opinion que j’ai de moi-même devient trop humble, et confie-toi à quelques-uns des bons pères de l’abbaye, dont la sagesse et l’onction déchargeront ton cœur du poids le plus lourd. Il y a le père Ulrich, c’est un modèle de vertu et d’abnégation ; et le père Cuno, qui est encore plus édifiant, s’il est possible : mais le père Siegfried est le plus parfait de tous ; il surpasse même en sainteté le révérend abbé, le pieux père Boniface lui-même ! Enfin, mon fils, quelque chagrin que tu ressentes, va sur la montagne, entre hardiment dans l’église comme un pécheur que tu es, et recherche particulièrement les conseils et les prières du vertueux père Siegfried.

— Et toi, qui es-tu ? demanda le moine incertain, qui parles ainsi de moi en termes que je mérite si peu ?

— Je voudrais être le comte Emieh d’Hartenbourg ou l’Électeur palatin lui-même, afin de rendre justice à ceux que je révère. Dans ce cas, certains religieux du Limbourg recevraient des faveurs spéciales, et promptes ; après mes parents toutefois ! Qui je suis, mon père ? Je m’étonne qu’un homme qu’on voit si souvent au confessionnal soit oublié. Ce qu’on peut louer en moi, père Siegfried, est dû à tes avis. Mais il n’est pas surprenant que je sois sorti de tout souvenir, puisque les humbles d’esprit doivent oublier leurs bonnes œuvres !