Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 12, 1839.djvu/82

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— Par les trois saints rois de Cologne et les onze mille vierges de cette honorable ville, maître Albrecht ! tu étais bien favorisé dans cette île étroite, s’il t’était permis de pécher à ta manière avec la certitude d’éviter la punition par de si légers services ! Ces moines rapaces de Limbourg vendent cher leurs faveurs, et celui qui veut conserver sa peau a soin de payer d’avance pour une indulgence. Je ne pourrais dire le nombre des tonneaux de pur vin du Rhin que de petites saillies de bonne humeur m’ont coûté ; mais je suis certain que s’il était possible de réunir tous ces tributs, il ne resterait pas un grand espace vide au fond de la tonne tant vantée du prince Frédéric dans ses immenses caves d’Heidelberg !

— J’ai souvent entendu parler de ce royal réceptacle d’une liqueur généreuse, et j’ai médité un pèlerinage en honneur de sa capacité. L’électeur reçoit-il les nobles voyageurs avec une hospitalité convenable à leur rang et à leur fortune ?

— Oui, et de bon cœur, quoique cette guerre ne l’enrichisse pas, et lui donne d’autres occupations. Tu n’auras pas un chemin bien fatigant à faire, car de ces montagnes on peut voir les tours d’Heidelberg, et un bon cheval pourrait partir de la cour de mon château, et arriver dans celle du duc Frédéric en une couple d’heures.

— Lorsque les mérites de ta cave seront épuisés, noble Emich, il sera temps de mettre la tonne à l’épreuve, répondit le chevalier de Saint-Jean, comme notre estimable ami, ici présent, en conviendra à la face de tous les réformes qui infestent notre Allemagne.

En introduisant de nouveaux personnages, nous réclamons la patience du lecteur pour une courte digression. Quoi qu’on puisse dire du mérite et de la légalité de la réforme, due principalement au courage de Luther (et nous ne sommes ni sectaire, ni incrédule, pour nier l’origine sacrée de l’Église dont elle est dissidente), on peut admettre généralement que le pouvoir non contesté de la religion dominante de cette époque avait conduit à des abus qui appelaient hautement des changements dans l’administration ecclésiastique. Des milliers d’hommes, parmi ceux qui avaient dévoué leur vie au culte de l’autel, étaient aussi dignes de cet office sacré qu’il est donné à l’homme de l’être ; mais des milliers d’autres avaient pris la tonsure et le froc, ou tout autre